Poèmes pour enfants du temps présent
Poèmes pour enfants du temps présent...
en cours de reconstruction suite à un bug...
Je dédie cette page à Esther et Tristan qui la liront sur mes genoux quand ils étaient petits.
Je la dédie aussi à Robinson. En espérant le tenir un jour dans mes bras.
Cette page est destinée aux petits princes et petites princesses pour qu'ils découvrent leur poème dans ce beau désordre. Mais aussi à Papa, à Maman, à la maîtresse ou au maître.
Donner un poème à un enfant, c'est le faire entrer dans un pays qui ouvre les portes du rêve et de la vie. Donner un poème à un enfant, c'est partager l'amour mais c'est aussi lui apprendre l'indispensable fantaisie. Voici de premiers textes. D'autres suivront très vite, avec peut-être la collaboration de tous (voir en fin de page).
Les références sont souvent manquantes mais elles apparaîtront peu à peu.
A découvrir en vagabondant et en donnant du temps au temps.
La présentation et la disposition des poèmes sera peu à peu améliorée.
Je me permets d'ajouter quelques poèmes extraits de mon recueil Poèmes pour Robinson ici ou là...
Petit Robinson
Avec ton prénom d'île déserte
Tu habites par delà
Une mer de silence
Que même un poème ne peut franchir
Et pourtant comme un fou que je suis
Je rêve de voir un jour
Mes pauvres mots s'échouer
Sur la plage de ton sourire
© Guy Allix, Poèmes pour Robinson, Soc et foc, 2015
***
Une mouche
Une mouche a mouché
Les chandelles
De la chapelle.
Le chapelain choqué
Pourchassa
Dans la chapelle
La mouche qui moucha des chandelles.
Mais la mouche échappa,
Echappa
Au chasse-mouches.
Échappa
Au, chasse-mouches
Du chapelain qui louche.
P. Coran. Comptines pour ne pas chuinter, éd. Casterman
***
Connaissez-vous ?
Connaissez-vous cet astre noir
Aux huit rayons vils et velus ?
Au bout d'un fil s'est laissé choir
Sur les étoiles du talus.
Avec des halos de dentelle
Entre les herbes irisées,
Il tisse vite son ombrelle
Où viendra rire la rosée.
Plus d'un céleste voyageur
S'y embarrasse l'aileron.
L'astre bondit, le crime au front,
Et le poignarde, droit au cœur.
Alain Debroise, Mon premier livre de devinettes
***
Pour Esther et Tristan
Je fus un père sans père
Et sans repère
Un père sans patrie
Un père sans passé
Je ne fus pas
Même l’ombre d’un père
Il n’y eut que cet amour pour mes enfants
Ce souci de leur avenir
Il n'y a que cet amour qui n’est pas une patrie
Mais le vœu d’un autre monde sans frontière
Où l'homme est pardonné et la foule sans haine
Guy Allix
***
Les mouettes
Je te donne trois mouettes
La pulpe d'un fruit
Le goût des jardins sur les choses
La verte étoile d'un étang
Le rire bleu de la barque
La froide racine du roseau
Je te donne trois mouettes
La pulpe d'un fruit
De l'aube entre les doigts
De l'ombre entre les tempes
Je te donne trois mouettes
Et le goût de l'oubli
Andrée Chedid
***
Les crapauds
en été les crapauds dinent très tôt
à croupetons dans leurs jabots baveux
servis par des têtards
puis très sérieux ils hurlent des gros mots
jusqu'à très tard
pendant ce temps dans leurs salons de nénuphars
dames crapaudes pondent
des petits déjà tout vieux
futurs fêtards
Jean-Louis Maunoury, Bêtes à bon dieu, revue Offset n° 12/13
***
Quand je serai grand
dit Petit Gland
on m'appellera
Monsieur le Gland.
Quand tu seras grand
reprend Maman
on t'appellera
monsieur le Chêne.
Ah non, pas de chaînes
crie Petit gland
je veux rester libre
un Gland c'est tout!
Qu'à cela ne tienne
répond le mère
reste donc ainsi
petit gland-bec !
Paul-Henry Vincent
***
Tu dis
Tu dis sable
et déjà
la mer est à tes pieds
tu dis forêt
et déjà
les arbres te tendent leurs bras
tu dis colline
et déjà
le sentier court avec toi vers le sommet
tu dis nuage
et déjà
un cumulus t'offre la promesse du voyage
tu dis poème
et déjà
les mots volent et dansent
comme les étincelles dans ta cheminée.
Joseph-Paul Schneider
***
Quand j'étais petit
Je n'avais pas de papa
Mais je rêvais surtout d'un papy
Mes copains parlaient souvent
De ces êtres mystérieux
Un grand-père une grand-mère
Un papy c'était pour moi
Comme une île lointaine
Et aujourd'hui
Cette île c'est toi
Guy Allix, Poèmes pour Robinson, Soc et foc, 2015
***
orangs-outans
l'orang-outan et l'orange-outane sa chère moitié
sont des singes vraiment étranges
avec leur pelage orange et leurs bras longs jusqu'à
leurs pieds
ils mangent en rotant et en proutant
ils se lèchent sans se gêner où ça les démange
vous pouvez les regarder c'est pas ça qui les dérange
en plus ils font où ça les arrange
et ils ne changent jamais de linge
de sorte qu'ils puent comme des harengs
vautrés dans leur fange ils sont toujours contents
ils n'arrêtent pas de rire aux anges
tout en se chouchoutant
oui vraiment l'orang-outan est un dégoûtant
et l'orange-outante
une dégoûtante
Jean-Louis Maunoury, Bêtes à bon dieu, revue Offset n° 12/13
***
un escargot
il pleut
je sors tout habillé
un escargot me regarde étonné
un oeil dressé à bout de corne
et l'autre descendu
c'est qu'il n'a jamais vu
quelqu'un sortir de sa coquille
sans être tout nu
Jean-Louis Maunoury, Bêtes à bon dieu, revue Offset n° 12/13
***
merle
à défier le vent il s’égosille
virevoltant cherchant à se confondre
avec les mousses et les taillis
œil vif aile légère
friand d’arbouses et de prunelles
fantôme diurne
ou maraudeur fantasque
indifférent aux migrateurs
qui suivent leur chemin invisible
là-haut tout là-haut
en exil dans les nuages
lui il a choisi de rester ici
il y revient il en repart
le revoilà et déjà il n’est plus là.
Georges Cathalo, A l’envers des nuages (Encres Vives)
***
Saisons
Si je dis
les corbeaux font la ronde
au dessus du silence
Tu me dis c'est l'hiver
Si je dis
les rivières se font blanches
en descendant chez nous
tu me dis le printemps
Si je dis
les arbres ont poussé
leurs milliers de soleils
tu me dis c'est l'été
Si je dis
les fontaines sont rousses
et les chemins profonds
tu me diras l'automne
Mais si je dis
le bonheur est à tous
et tous sont heureux
quelle saison diras-tu
quelle saison des hommes ?
Jean-Pierre Siméon, Amour fraise et mandoline
***
Au revoir la terre
Bleu - nuit
Ils flottent dans le ciel
Un train
Un camion
Une carriole
Au revoir la terre, au revoir la terre !
Des notes de musique qui font broum broum
Pas de route précise
Dans tous les sens
Au revoir la terre, au revoir la terre !
Le cocher a le ventre qui gargouille
Les voyageurs font signe : à bientôt !
l'oiseau a l'air surpris
Au revoir la terre, au revoir la terre !
Anata Cuadros, 10 ans
***
Sitôt que je pense à toi
Les mots viennent dans ma bouche
Comme des billes
Et je joue tant et tant
Qu’un poème vient tout chaud dans ma main
Qui me parle de toi
Et du sourire de ta voix
Soudain multicolore
© Guy Allix, Poèmes pour Robinson, Soc et foc, 2015
***
Le petit clown blanc de la lune
Le petit clown blanc de la lune
Joue du violon, bat du tambour,
Jongle avec des noyaux de prunes,
Des diamants, des pommes d'amour,
Dans la douce nuit de velours.
Le petit clown blanc de la lune
Se balance au ciel en rêvant ;
Par-dessus la mer et les dunes,
Il se laisse bercer au vent
Sur son grand trapèze volant.
Le petit clown blanc de la lune
Me regarde au fond de la nuit.
Il console mes infortunes,
Il me sourit, pâlit et puis
Le petit clown s'en va sans bruit.
Jacques Charpentreau, Le Clown, éditions Motus
***
Fantôme d’oiseau
Le fantôme d’un oiseau
Dans le fantôme d’une cage
Jouait de la clarinette et du piston
Tandis que je te parlais doucement à l’oreille
De nos amours anciennes
Qui n’avaient jamais existé
Avec des mots d’amour inoubliables
Qui s’envolaient doucement
Dans l’air léger
Joseph Bodson
***
Les mouettes
glissent sous le ventre noir du ciel
volent vers les îles incertaines
des ports des falaises
qui n’existent que dans leurs rêves
C’est ainsi chaque matin
sur le rivage quand s’éloigne une barque
dans la mer
C’est ainsi
chaque matin
depuis qu’elles sont dans le ciel
Michel Cosem, Plumes tièdes du matin, Editions Tertium
(Collection A la cime des mots, poésie jeunesse, 2009)
***
CARACOLLE
L’escargot Caracolle a du chagrin.
C’était toujours lui le roi des lambins ;
Malgré la belle armure qu’il portait,
Les autres animaux de la forêt,
Au lieu de l’appeler « Preux Chevalier »,
S’étaient tous mis d’accord pour le railler.
Quand le chat s’approchait de lui – Misère ! –
Il pouvait bien réciter ses prières.
« Arrêtez ! criait-il, ce n’est pas drôle,
Je ne suis pas un ballon de football.
Si vous jouez, je vis dans ma chaumière
Un véritable tremblement de terre ! ».
Or les plus grands comme les plus petits
N’avaient guère ici-bas d’égards pour lui.
Les escargots avaient par maléfice
Toujours été lambins de père en fils.
La puce, elle-même, était plus rapide
Et, finalement, beaucoup moins stupide.
L’escargot Caracolle a le cœur gros :
Coquille ou pas, il en a plein le dos !
Michel Duprez
***
Le petit dix heures
Il est bon que l’on ait
Un poème pour la route
Qu’on le choisisse beau
Qu’on l’aime et l’emmitoufle
Comme un biscuit d’enfant
Caché avec amour
Dans un recoin secret
Sous l’écharpe et les moufles
Commpagnons de voyage
Ils auront tout leur temps
Qu’on les garde soumis
Pour la petite faim
Car elle peut surgir
Un moment comme un autre
Sans que sonnent dix heures
Du soir ou du matin
Pierre Guérande
***
Le chat Pacha
Sancho Pança
De la gouttière
Le chat Pacha
Chassait les rats
Un rat pas sot
Flatta le chat
Chat de gouttière
Ou bien d'ailleurs
Peux-tu passer
En moins d'une heure
Dedans le chas
D'une aiguière
De l'aiguière
Ou bien d'ailleurs
Le chat peu chaud
S'y essaya
Pour son malheur
Il s'y coinça
Cossu pansu
Le chat Pacha
Aurait voulu
Flouer le rat
Mais c'est le rat
C'est incongru
Qui tu l'as vu
Floua le chat
Jeannine DION-GUERIN
***
On a volé la mer
Mais où est donc passée la mer
Dans le brouillard pas de repère
Le ciel a envahi la terre
Et sur la terre était la mer
Désemparée nue comme un ver
Je me blottis dans cette sphère
Rien que du gris rien que le fer
Mais où est donc passée la mer
Y a pas de haut y a pas de bas
Ni de devant ni de derrière
Y a pas de sens y a que c'qu'y a
Une noyée au fond d'un verre
Jeannine DION-GUERIN
***
Un petit clavecin...
Un petit clavecin bavardait comme un trou
Tout béat et transi, à genoux dans la brune
Et moi je l'écoutais
Caché dans la poubelle
Et je comptais comptais
Les pas nous séparant
Séparant de l'aurore.
Emeric de Montenard
***
Ephéméride des nuages
entre deux nuages
l’éclair d’une étoile
et la nuit
voyage immobile
au creux des nuages
le jour se lève
Oiseaux de passage
griffent les nuages
et disparaissent
élan d’amour fou
amour des nuages
se laisser aimer
et la pluie soudain
invente des fenêtres
dans un mur de nuages
dire qu’ils sont là
n’est pas innocent
innocents nuages
Nuage furtif
où le ciel se cache
ouvrir l’œil
cache-toi nuage
moule roule coule
indocile et fier
aussitôt vu
aussitôt disparu
nuage fantôme
avec patience
à l’abri à l’affût
un nuage veille
plus loin plus près
visible invisible
simple nuage
et la nuit se pose
et le temps s’arrête
un nuage passe
Georges Cathalo, A l’envers des nuages (Encres Vives)
***
Sais-tu bien
Qu’un monsieur très loin
Pense à toi souvent
Il prononce doucement ton nom
Robinson
Et c’est alors comme des vagues
Qui viennent s’échouer
A deux pas de ton cœur
Sur ton île déserte
Tu écoutes le silence qui suit
Croyant te souvenir
D’une rencontre future
© Guy Allix, Poèmes pour Robinson, Soc et foc, 2015
***
Am Stram Gram
A toi mon âme
Où se trame
Dans mon sommeil
Si je n'y veille
Un filigrane
D'amertume
Et pour cette tune
D'amertume
Que je hume
Insolemment
D'un coup de vent
Mon mât se braque
Et je m'y colle
Et je m'y pique
Repique et colle
Un gramme de folie
Dans un morne
Epigramme
A toi ma nuit
Refuse d'égrener
Comme gangrène
Le chapelet de l'ennui
Pique, pique et trame
Les gammes de ta vie
Jeannine DION-GUERIN
***
Les mots aussi ont leur nuit
Ils se taisent alors
opaques denses
On se couche dans leur silence
Comme un chien fait le mort
et on attend
longtemps
qu’ils se mettent à bruire
doucement
comme une source
Jacqueline Saint-Jean, Entre lune et loup, Livre de Poche Jeunesse, ouvrage épuisé, (Grand prix de Poésie Jeunesse 1994)
***
Le jour se lève
Après s’être couché
Toute la nuit
Les oiseaux à l’unisson
Lui souhaitent la bienvenue
Derrière un petit amas de nuages
Le soleil encore engourdi
De sommeil
Le salue le sourire aux rayons
La rosée lave les brindilles
La brise secoue les rameaux
Cajole les ormes
Les mots un à un s’étirent
Les phrases baillent
Le verbe semble chercher sa voie
L’harmonie sort de sa torpeur
Le jour se dresse
Après s’être étendu
Toute la nuit
Dans son lit d’obscurité
Ahmed El lnani
***
Entre les plis de la pluie,
les premières encres
sèchent encore au verger
et déjà tu reconnais l’oiseau
à son empreinte sur le vent,
à ce chant en suspens
dans l’instant du pommier,
à ce rien
qui allège ton cœur.
Gérard Cousin
***
Echappée
A contre-ciel
une leçon de grammaire
où les points et virgules s’enlacent.
Sur l’appui de la fenêtre
un merle moqueur observe l’enfant qui peine
à se souvenir
Une brisure invisible
et puis le silence.
Attendre ou continuer
à chercher au creux des mémoires ?
Chantal Couliou, A cloche pied, Editions Tertium, (Collection A la cime des mots, poésie jeunesse, 2009)
***
La nuit
quand les rêves se faufilent sous l’oreiller
je joue à cache-cache
avec des histoires à dormir debout.
Chantal Couliou, A cloche pied, Editions Tertium, (Collection A la cime des mots, poésie jeunesse, 2009)
***
La nuit rayonne
relie l’immensité
au bruissement des feuilles
je me referme
comme les fleurs
de nuit en nuit
le jour s’éclaire
traverse le feu
plus il fait nuit
plus je vois
je m’éclaire de ce que je sens.
Marie-Josée Christien, (Regarde la nuit,recueil pour jeunesse en cours d’écriture), Texte publié dans Cairns n°6 (janvier 2010).
***
Entre ciel et terre
Sous le ciel
j’ai mis mon chapeau,
sous mon chapeau
j’ai mis ma tête,
sous ma tête j’ai mis mon cou
et sous mon cou
j’ai mis le reste.
Reste qui n’a pas d’importance
Je n’ai pas trop les pieds sur terre.
Michel Astre
***
Ce qui me fait rire
Donnez-moi un moustique à bicyclette,
Un dromadaire avec un gibus sur la tête,
Un kangourou qui joue de la trompette,
Un lapin qui mange son herbette
Avec couteau et fourchette,
Une araignée qui porte des lunettes,
Un escargot fumant la cigarette.
Ou bien ne m’en donnez pas tant
Mais dites-moi plutôt quelque chose
“ je me suis disputé avec une rose,
j’ai mangé une chaise et je l’ai trouvée
Trop salée
Mon manteau aime la risotte
A ma machine
A écrire il a poussé une canine ”
Ou bien ne m’en dites pas tant
Mais plutôt montrez-moi
Un sot qui se croit intelligent.
Gianni Rodari, La tête pour penser
***
Mon lit est un bateau
Mon lit est un petit bateau;
Nounou m’aide à y embarquer,
Me met l’habit de matelot,
Me pousse dans l’obscurité.
De nuit, à bon bord, je dérive,
Salue mes amis sur la rive;
Je ferme les yeux, vogue au loin,
Et ne vois ni n’entends plus rien.
Parfois j’emporte des objets
Qu’emportent les bons matelots
Peut-être un morceau de gâteau,
Ou bien encor quelques jouets.
Toute la nuit nous dérivons ;
Mais quand le jour revient briller,
Rentré dans ma chambre, au ponton
Je vois mon vaisseau amarré.
Robert Louis Stevenson, (1850/1894)
***
Quand je serai pas clown
Je n'aurai pas de nez rouge
Au milieu de la figure
Je n'aurai pas de pieds
Longs longs dans mes chaussures
Je n'aurai pas de cheveux fous
De cheveux roux de cheveux saouls
Ni de z'yeux qui pleurent en fontaine
Ni de crème qui dégouline sous les feux
Ni de cris sur la piste
Ni de rires immenses complices
Je ne m'appelerai pas Mimile Zigoto Badini Tatava
Je m'appelerai M. Moi-Moi-Moi-Moi-Moi-Moi
Et j'aurai une cravate et des cartes de visite en relief
Quand je serai pas clown J'aurai oublié
Le pitre dans mon cœur Qui dansait.
François David, Le Clown, éditions Motus
**
Ce qui reste de l’été :
une petite feuille comme une patte de chat
qui remue au vent glacé
Elle a couru tout l’été dans les fougères
dans les chemins herbeux
et s’est arrêté souvent
près de l’écorce des bouleaux blancs
Elle est seule maintenant
ne sait plus rien et plus rien ne peut
lui faire peur
Michel Cosem, Plumes tièdes du matin, Editions Tertium, (Collection A la cime des mots, poésie jeunesse, 2009)
***
La girafe
La girafe et la girouette
Vent du sud et vent de l’est,
Tendent leur cou vers l’alouette
Vent du nord et vent de l’ouest.
Toutes deux vivent près du ciel,
Vent du sud et vent de l’est,
A la hauteur des hirondelles,
Vent du nord et vent de l’ouest.
Et l’hirondelle pirouette,
Vent du sud et vent de l’est,
En été sur les girouettes,
Vent du nord et vent de l’ouest.
L’hirondelle fait des paraphes,
Vent du sud et vent de l’est,
Tout l’hiver autour des girafes,
Vent du nord et vent de l’ouest.
Robert Desnos, (1900/1945)
***
Mon cartable
Mon cartable a mille odeurs
Mon cartable sent la pomme
Le livre, l’encre, la gomme
Et les crayons de couleurs
Mon cartable sent l’orage
Le bison et le nougat
Il sent tout ce que l’on mange
Et ce que l’on ne mange pas
La figue et la mandarine
Le papier d’argent ou d’or
Et les coquilles marines
Les bateaux sortant du port
Les cow-boys et noisettes
La craie et le caramel
Les confettis de la fête
Et les billes remplies de ciel
Les longs cheveux de ma mère
Les joues de mon papa
Les matins dans la lumière
La rose et le chocolat
Pierre Gamarra, in La tarte aux pommes, collection "poètes contemporains", Ecole des loisirs, 1985.
***
Si les enfants...
Si les enfants obéissaient,
Les enfants seraient...
Chimpanzés.
Si les enfants étaient prudents,
Les enfants seraient...
Desserpents.
Si les enfants disaient toujours “ oui merci bonjour s’il vous plait ”,
Les enfants seraient...
Perroquets.
Si les enfants manquaient d’audace,
Les enfants seraient...
Des limaces.
Si les enfants étaient...
Assez ! Assez !
Assez d’enfants amidonnés, grattés, rentiers,
Assez ! Assez !
Jacqueline Held
***
Recyclage
Le clown était hors circuit
Entre deux représentations,
Entre deux répétitions ...
- As-tu fini de faire le clown ?
Dit au clown
Le Directeur du cirque.
Et le clown interdit
S'interdit
De faire le clown.
Il fit
Le chien, le singe, l'otarie
Savants,
Naturellement.
Et tout le monde Applaudit.
Jacqueline Held, Le Clown, éditions Motus
***
POISSON
Tant de fois
tu l'avais croisée
sur ta route
que tu n'as pas vu
venir la mort
Elle t'a eue
par surprise
un premier avril
Jean-Claude Touzeil, Petits cailloux pour Gita, L'écho optique
***
Séisme
La première fois
que j'ai vu ma mère
pleurer
j'étais tout petit
le facteur avait apporté
un télégramme
Le billet bleu
plié dans sa main
plié chiffonné
torturé
annonçait la mort de mon père
Je ne comprenais pas bien
ne voyais pas le rapport
de cause à effet
mais voir ma mère
pleurer
fut mon premier
tremblement de terre
Jean-Claude Touzeil, Petits cailloux pour Gita, L'écho optique, 2008
***
Nostalgie
Certaine soirs,
quand papa lui avait dit
une parole de travers,
maman avait un coup de blues
et songeait à son pays,
à son frère, à ses sœurs.
Son pays qu'elle avait quitté
avec sa jeunesse...
Son pays qu'elle idéalisait
où tout était mieux que chez nous,
sa famille à qui elle envoyait
des colis de vêtements.
Son frère qu'elle adorait
et qui n'écrivait jamais.
Ses sœurs qui avaient partagé
ses éclats de rire.
Son pays qu'elle avait quitté
avec sa jeunesse...
Jean-Claude Touzeil, Petits cailloux pour Gita, L'écho optique, 2008
***
Le chameau
Un chameau entra dans un sauna
Il eut chaud Très chaud
Trop chaud
Il sua
Sua
Sua
Une bosse s’usa
S’usa
S’usa
L’autre bosse ne s’usa pas.
Que crois-tu qu’il arriva ?
Le chameau dans le désert
Se retrouva dromadaire.
Pierre Coran, La tête en fleur, Ed. Le Cyclope
***
Tu as passé la petite heure du matin
à rassembler les sources et les parfums.
Tu as fait provision d’air bleu,
d’une embellie de libellule
et de mille autres petits secrets.
Les bras en balancier,
tu avances sur le fil du jour
un plein d’espoir dans chaque main.
Le ciel aussi y croit
qui grandit avec toi.
Gérard Cousin
***
Jeu de piste
Elle épousa
Un rabat-joie
Pour sa richesse.
Amour doux-amer !
Elle ruina
Le rabat-joie,
Se fit clownesse.
Au Cirque d'Hiver.
Pierre Coran, Le Clown, éditions Motus
***
Magma
Il se réveilla,
toussa
éructa.
La quinte le reprit,
L’oppressa,
l’étouffa.
L’un coup, il fit sauter le chapeau
qu’il n’avait plus ôté
depuis des décennies.
Il en sortit des pluies
de feu,
de suies,
de cendres.
Longtemps, il hoqueta,
bava,
tira la langue
tel un loup, flancs ouverts,
à bout de vie exsangue.
Pas de foule accourue,
peu de flashes,
de rares paysans de la montagne à vaches.
Alors, déçu, vexé, il referma la bouche,
fit taire son étuve
puis il se rendormit
avec ses rêves de Vésuve.
Pierre Coran
***
Elle m'a dit
Je t'aime beaucoup
Beaucoup
C'est pas assez
A-t-elle ajouté
Et elle a effacé
"Beaucoup"
Jean Rivet, Le soleil meurt dans un brin d'herbe, éditions Motus
***
Le cerisier le grand cerisier
Dont les branches sous la lune
Perdent leurs feuilles
Ce cerisier le grand cerisier
Que l'hiver rejoint
Quand Margaux apprend
Quelque mot nouveau
Et qu'elle me prend la main La main
Et que le soleil meurt Dans un brin 'd'herbe
Jean Rivet, Le soleil meurt dans un brin d'herbe, éditions Motus
***
- Tu as quel âge ?
- J'ai soixante-douze ans
- C'est vieux
- Oui c'est vieux
- Tu es le plus vieux ?
- oui
- Alors tu mourras avant Mamie ?
- Oui
- C'est bien
Jean Rivet, Le Soleil meurt dans un brin d'herbe, éditions Motus
***
Grande marée
Aujourd’hui grande première
à la mer
Sous la baguette du vent
l’océan joue Wagner
Et sautent les vagues
comme des petits rats
en tutus d’écume blanche
Les jours de grande marée
ne venez pas chez moi
je suis à l’opéra
Clod’Aria
***
drôles de clowns
Monsieur Glouglou est un clown-barrique
quand il se débouche tous les gens sont ivres sur les gradins
lorsqu'il était enfant pourtant il détestait le vin
Monsieur Zigzig est un clown-fusée
allumez-le il monte haut dans le ciel grand ouvert
mais lorsqu'il était petit seule une fessée
lui mettait le feu au derrière
Monsieur Fredo est clown-frigo
ouvrez-le et servez-vous en esquimaux
Monsieur Vroum est clown-aspirateur
il avale tout ciseaux papiers cailloux pour votre bonheur
Monsieur Marteau lui est clown-piano
quand on lui tape dessus il joue des airs
autrefois il aurait répondu à coups de poing
et toi, garçon, quel drôle de clown seras-tu ?
quel mal sauras-tu te faire
pour faire aux autres du bien ?
Jean-Louis Maunoury, Le Clown, éditions Motus
***
Granulés
Un oiseau
qui mange trop
de granulés
devient
gras
nul
et laid.
Michel Besnier
***
Toutes les mains
Il y a des mains de bruyère
qui nous font signe
sur les chemins du soir
Il y a des mains d'eau calme
qui dorment sur le sable
Il y a la main de l'aube
où la mésange fait son nid
Et la main de pierre aussi
où le lézard se nourrit de soleil
Toutes les mains ont leur histoire
qu'elles soient filles des oiseaux
ou de la neige reposée
ou rude écorce
ou feuille douce
et la caresse est leur mémoire
Jean-Pierre Siméon, La Nuit respire, Imprimerie de Cheyne
***
L'arbre bercé
pour Anaïs
Mon enfant, ne tremble pas
tu portes un arbre dans tes bras
le vent te coiffe
et l'oiseau glisse dans ta voix
Allonge-toi fragile
dans le drap odorant d'une ombre
caresse la barque des feuilles
Dors, mon enfant
dans tes branches closes
tu tiens dans ton poing fermé
le fruit chaud du silence
Et chaque jour plus haut
mon enfant
tu deviens l'arbre que j'attends
Jean-Pierre Siméon, La nuit respire, Imprimerie de Cheyne
***
La chenille
Elle épouse le rail unique des nervures
Avec ses soufflets ses wagons
tous nos raves en voiture
jusqu’à la gare papillon
Omnibus et chenillard
voici donc la gare cocon
agitez vos blancs mouchoirs
mon terminus c’est papillon
Voici la fin de l’aventure
je m’envole c’est ma station
qu’on me pardonne les ratures
puisque voilà le papillon.
Jean-Hugues Malineau
***
Tu as tout à me dire
de l’onde des tes rêves.
Mais tu ne sais plus.
Rien qui soit à la portée de tes mots.
Il te reste un poudroiement lointain,
un trouble merveilleux
et tes yeux qui font leur plein de lumière.
Gérard Cousin
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Sourire
à un enfant turc
Ton sourire ouvre la porte du monde
ton geste doux parle d’un pays
d’arbres et de sources
de chants ensoleillés
de tambours qui battent dans la nuit
de légendes au cœur gros
du blé qui pousse si haut dans la montagne
et du vent au goût de résine
Ton sourire ouvre la porte du monde
il est comme un enfant volant dans l’azur
il va et vient et ne veuf jamais s’arrêter
Michel Cosem
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LE CACHALLO-ALLO
Quand je trempe ma ligne à l'eau,
il n'y a personne au bout du fil.
Que fait donc le cachallo-allô
dont c'est pourtant le boulot
de s'occuper du téléphone
sous l'eau.
C'est lui qui fait passer les mots, sur les ondes sous les vagues
du Pacifique tic
tac, de l'Atlantique clic
clac. Où est passé ce cétacé ?
Et l'oreille au coquillage,
je n'entends rien du rivage.
Que fait-il donc dans tout ce bleu ?
Où se cache le cache
allô, allô, allô ?
Constantin Kaïteris, Les Zanimaux Zétonnants, Corps-Puce
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J’ai vu le menuisier...
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