Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
Guy Allix, poète
Guy Allix, poète
Pages
6 mars 2022

Poèmes pour le dimanche et pour l'amitié (4)

Poèmes pour le dimanche et pour l'amitié (4)

à la résistance du peuple ukrainien contre l'ogre russe

 

 

C'est mon ami ficèle Bruno Sourdin qui m'accompagne, avec un poème d'une terrible profondeur, ce dimanche, 11e jour de l'agression russe contre l'Ukraine.  Ce poème de Bruno sur les bombes de 1945 me semble d'une pleine actualité.

Comme on le voit, la barbarie est toujours de mise. Elle fut américaine à Hiroshima et Nagasaki en 1945, pendant la guerre du Vietnam et lors de la guerre contre l'Irak en 2003 par exemple. Elle est clairement aujourd'hui russe, du fait d'un dictateur paranoïaque, sanguinaire, délirant, sans aucun scrupule et sans aucune pitié, tout à son souci (à son obsession) de rétablir les frontières de l'empire soviétique. Qu'il puisse y avoir des "causes" à cette agression n'est pas la question car ces "causes" ne sont là que prétextes pour le Goliath qui agresse le petit David ukrainien et qui aurait trouvé d'autres prétextes de toute façon pour une intervention sans aucune mesure et qui ira jusqu'à l'annexion de l'Ukraine, à qui il dénie toute identité. Cela rappelle un autre ogre au XXe siècle. L'Ukraine n'existerait pas mais pourtant le peuple ukrainien existe bien, lui, et le montre assez par sa résistance, sa dignité et son courage ! Faut-il mourir pour... Kiev ? On comprend que la question est d'une difficulté terrible à l'heure ou l'ogre russe menace de la bombe justement... de la terreur atomique : ignoble chantage. Les Ukrainiens, eux, ne se posent pas cette question. Ils meurent pour Kiev et pour l'Ukraine !

Et pour la liberté !

Ils résistent contre l'ignoble ! Comme Missak Manouchian, "invité" dans ces poèmes pour le dimanche, il y a quinze jours, a pu le faire avec ses camarades. 

Peu m'importe le "camp", russe ou américain, j'ai d'ailleurs, j'ose le dire, plus de respect pour le peuple russe que pour le peuple américain. Simplement, je reste fidèle à mes principes et je ne transigne pas. Je suis Vassal du poème, non d'un pouvoir quel qu'il soit. Et je hais toutes les volontés impérialistes. 

 

J'ai donc choisi ce texte de Bruno qui, dans les circonstances présentes, nous aide à voir et je mets en ligne, suite à ce texte, ma lecture sur Youtube de "Puisqu'il me faut quitter cette terre". 

 

De mon côté, je joins simplement un poème d'amour de mon côté. Poème certes un peu triste comme souvent chez moi, mais où l'amour, malgré tout, subsiste à la mort de son histoire. Et cette survie de l'amour contre l'ignoble est après tout un bonheur, et même une espérance... Il est si beau d'aimer encore, d'aimer toujours, envers et contre tout.

 

La dernière urgence

  

Quand ce sera la dernière fois de nous

Le dernier cœur à corps

La dernière urgence

Et que nous ne saurons pas plus qu’avant

Pas plus qu’après

 

Quand ce sera déjà après

Et que nous lèverons un peu la tête comme avant

Mais sans plus de foi

Mais sans moins de foi

Sans plus de courage qu’avant

Mais avec ce souffle vain

Une dernière fois

 

Nous rentrerons dans l’ombre

Dont nous n’étions jamais sortis

Autrement que par cet amour

 

Quand ce sera la dernière fois de nous

Quand ce ne sera plus que notre amour à jamais

Et à jamais fini

 

Quand ce sera la dernière fois de toi

De moi qui à jamais t’aimais

 

Guy Allix, Survivre et mourir (éditions Rougerie, 2011)

 

 

 

Puisqu’il me faut quitter cette terre

 

Puisqu’il me faut quitter cette terre où je ne reconnais plus rien, ni les rivières ni les arbres ni l’eau ni le vent

Je ne voudrais pas partir sans dire adieu à l’étoile qui me suivait

Adieu à l’air du printemps, au cri des corbeaux oiseaux vagabonds

Adieu à l’esprit du tonnerre et de la fumée, à l’esprit qui souvent proteste

Adieu aux nuages et à l’herbe fraîche

Adieu à la machine à pluie, à l’arc-en-ciel laissé à l’abandon

Adieu à la plus belle nuit de ma vie, à cet étrange sentiment d’éternité

Adieu à la foudre dans le vide obscur

Adieu à mes enfants aux yeux de soleil, société secrète des corps immobiles

Adieu aux galops des chevaux, cliquetis incessants de la pendule

Adieu à ma maison pleine de livres

Adieu aux foules sans noms, têtes de mourants terrifiés

Adieu aux mamans brûlées vives entre les mains de la bombe

Adieu aux visages cloqués et écorchés, muses irradiées accablées de chagrin dans la nuit qui tonne

Adieu aux esprits anéantis avalés par le champignon géant, aux esprits rampant dans leurs excréments

Silhouettes écorchées, restes calcinés des villes, peaux arrachées, décombres en flammes

Adieu au crépuscule de fer

Adieu poème mort

Je ne voudrais pas quitter cette terre sans dire adieu à ma douce mère, frères humains méconnaissables

Adieu hirondelles âmes brillantes et salut aux nouveaux fantômes déjà en marche dans l’inconnu

  

Bruno Sourdin, in L'air de la route, éditions Gros textes, 2013

 

 

 

 

On peut retrouver Bruno sur mon anthologie subjective.

 

Publicité
Commentaires
M
Pour accompagner ces beaux textes. Du poète ukrainien Taras Chevtchenko (1814-1860) :<br /> <br /> Rugit et gémit le vaste Dniepr,<br /> <br /> Furieusement hurle le vent,<br /> <br /> Il courbe les hauts saules jusqu'à terre,<br /> <br /> Lève des vagues pareilles à des montagnes.
Répondre
Guy Allix, poète
Publicité
Archives
Newsletter
Visiteurs
Depuis la création 71 732
Publicité